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Alimentation du nourrisson

La fiche qui suit dresse une image globale de l’utilisation des préparations lactées en pédiatrie. Elle vous permettra d’acquérir les notions de base afin de pouvoir adéquatement recommander vos patients en pharmacie communautaire. Au lieu d’avoir les structures usuelles présentes dans les autres fiches de ce site, cet algorithme de traitement est divisé en différentes sections permettant de mieux présenter l’information.

 

L’allaitement exclusif

Avantages
Santé-Canada recommande l’allaitement exclusif jusqu’à l’âge de 6 mois et, par la suite, l’introduction d’aliments en concomitance avec le lait maternel. Le lait maternel est riche en nutriments et apporte une protection immunologique supplémentaire. Selon l’OMS, l’allaitement maternel est le meilleur moyen de fournir une alimentation qui favorise le développement et la croissance d’un nourrisson en bonne santé.

Contre-indications
Selon Santé-Canada, l’alcool et le tabagisme sont à éviter lors de l’allaitement, mais ne sont pas des contre-indications absolues. Les avantages de l’allaitement dépassent les risques associés à la consommation de ces substances. En réalité, l’allaitement est rarement contre-indiqué. Selon la SOGC, les antinéoplasiques, certains immunodépresseurs, les alcaloïdes de l’ergot, l’or, certains médicaments radioactifs et certains anticonvulsivants sont dangereux lors de l’allaitement. De plus, la galactosémie congénitale chez le nourrisson reste une contre-indication absolue à l’allaitement. Finalement, la séropositivité au VIH ou d’autres maladies transmissibles par le sang chez la mère peuvent aussi être une contre-indication à l’allaitement.

 

Préparations lactées
Les préparations lactées sont l’alternative principale à l’allaitement maternel. Les préparations du premier âge sont destinées aux enfants âgés entre 0 et 1 an, alors que les préparations lactées de transition (deuxième âge) sont à utiliser chez les nourrissons de 6 mois et plus qui consomment des aliments solides. L’algorithme qui suit donne une idée générale du choix de la préparation lactée en fonction des caractéristiques du nouveau-né.


Algorithme de choix des préparations lactées
Problèmes reliés à l’alimentation du nourrisson

Intolérance au lactose :

  • Mécanisme : Déficience relative en enzyme lactase dans l’intestin causant des symptômes gastro-intestinaux lors de l’ingestion de produits contenant du lactose.
  • Signes et Symptômes : Ballonnements, crampes abdominales, gaz, diarrhées. Les symptômes apparaissent entre 30 minutes et 2 heures après avoir ingéré du lactose.

 

Allergie aux protéines bovines :

  • Mécanisme : Réaction immunitaire aux protéines de lait de vache. La plupart des cas se résorbent vers l’âge de 3 ans.
  • Signes et Symptômes : Ballonnements, crampes abdominales, gaz, diarrhées, vomissements en jet, sang dans les selles, rash, urticaire, eczéma, symptômes respiratoires possibles

 

Végétalisme :

  • Mécanisme : Pratique alimentaire qui exclut les produits animaux, que ceux-ci soient morts (viandes, poissons, etc) ou vivants (lait, œufs, miel).
  • Signes et Symptômes : Ne consomment pas de préparation lactée à base de protéines de lait de vache.

 

Galactosémie :

  • Mécanisme : Maladie congénitale qui se traduit par un taux élevé en galactose dans le sang, dû à une déficience en l’enzyme nécessaire à son métabolisme.
  • Signes et Symptômes : Les vomissements, l’augmentation du volume du foie et la jaunisse sont les premiers signes. Les infections bactériennes, l’irritabilité, un poids qui n’augmente pas et la diarrhée sont aussi souvent présents. Si la maladie continue à évoluer, il peut y avoir des conséquences au niveau de certains organes, tels que des dommages au foie, au cerveau, aux yeux et aux reins.

 

Reflux ou régurgitation :

Pour plus d’information sur le traitement des reflux et de la régurgitation chez le nouveau-né, veuillez consulter cette fiche : RGO chez le nourrisson.

Types de préparations lactées présentes sur le marché
Préparations standards
Le ratio lactosérum:caséine dans les préparations standards est similaire à celui présent dans le lait maternel, soit un ratio de 60:40. Cependant, certaines compagnies génériques présentent un ratio qui ressemble davantage au lait de vache, soit 18:82. Ces préparations sont donc plus difficiles à digérer pour les nourrissons, car elles contiennent une teneur plus élevée en caséine. Malgré que ces formulations sont généralement moins dispendieuses, il est préférable d’opter pour les préparations lactées qui respectent davantage le ratio lactosérum:caséine présent dans le lait maternel afin de favoriser une meilleure digestion du nouveau-né.
  • Enrichies d’omégas : Jusqu’à présent, il ne semble pas y avoir de bénéfices démontrés à long terme à prendre une préparation lactée enrichie d’oméga. D’un autre côté, il n’y a pas de risques non plus. Certaines études suggéraient un bénéfice sur l’acuité visuelle, le développement cognitif et la croissance physique des enfants, mais une revue Cochrane a conclu qu’il n’y a pas de bénéfices démontrés à l’ajout d’omégas dans les préparations lactées chez les nouveau-nés prématurés.
  • Enrichies en nucléotides : L’utilisation d’une préparation lactée enrichie en nucléotides pourrait potentiellement augmenter le poids du nourrisson et la circonférence de la tête, mais aucun bénéfice à long terme sur le développement cognitif n’a été prouvé.
  • Enrichies en fer : Il est recommandé d’utiliser une préparation lactée enrichie en fer, contenant au moins 1 à 1,2mg/100 mL de fer (sous forme de sulfate ferreux), dès la naissance et jusqu’à l’âge de 12 mois. Les préparations contenant plus que l’apport minimal suggéré sont donc aussi des bons choix, surtout pour les nouveau-nés prématurés. Cette teneur est nécessaire pour répondre aux besoins en fer qui permettront d’assurer une augmentation adéquate du volume du sang du nouveau-né. De plus, les préparations enrichies de fer ne sont généralement pas plus difficile à digérer et ne causent pas de constipation chez le nourrisson. L’utilisation d’une préparation qui n’est pas enrichie de fer n’apporte donc aucun bénéfice et augmente le risque d’anémie. À noter que toutes les préparations contenant moins de 0,4 mg/ 100 mL de fer devraient être discontinuées.
  • Enrichies en pré-biotiques : Ces préparations sont en général plus dispendieuses, mais des études auraient démontré un bénéfice sur la croissance de la flore intestinale et le développement du système immunitaire, entre autres, en diminuant le nombre d’épisodes et la durée des diarrhées chez le nourrisson. Cependant, de plus amples études sont nécessaires afin de valider ces informations.

 

Préparations lactées à base de protéines de lait de vache partiellement hydrolysées

Le seul avantage possible de ces préparations est la prévention de maladies atopiques, mais les données sont insuffisantes pour confirmer cette hypothèse. Les nourrissons à risque de développer une allergie aux protéines de lait de vache (ex : antécédents familiaux) pourraient bénéficier de l’utilisation de ce type de préparation, malgré que l’allaitement reste le meilleur choix. Elles ne peuvent pas être utilisées pour le traitement de l’allergie au lait, mais seulement pour sa prévention.

 

Préparations à base de soya

Les préparations à base de soya sont les seules formulations pouvant être utilisées pour le végétalisme, la galactosémie ou l’intolérance au lactose. Elles ne peuvent être utilisées chez les nourrissons présentant une allergie aux protéines bovines documentée (médiée par les IgE), car un risque de réaction croisée est possible. Elles ne peuvent non plus être utilisées pour prévenir les allergies aux protéines bovines chez les enfants à risque.

Il y aurait une inquiétude existante par rapport aux phytoestrogènes présents dans ce type de préparation. Cependant, les concentrations en phytoestrogènes sont trop minimes pour affecter le développement humain, la reproduction ou encore la fonction endocrine, et les formulations à base de soya sont donc considérées sécuritaires. Toutefois, certaines sources mentionnent quand même que les données sont insuffisantes pour statuer sur l’innocuité des préparations à base de soya chez les nouveau-nés.

À noter qu’il est rapporté que le lait de soya diminue l’absorption du synthroïd chez les enfants. Il devrait donc être évité chez les nourrissons présentant de l’hypothyroïdie congénitale. De plus, les préparations à base de soya peuvent ne pas assurer une croissance normale chez les enfants prématurés.

En résumé, les préparations à base de soya…

  • peuvent être utilisées dans les cas suivants :
    • Galactosémie
    • Intolérance au lactose (déficience en lactase)
    • Végétalisme
  • ne doivent pas être utilisées dans les cas suivants :
    • Hypothyroïdie congénitale
    • Prématurité
    • Prévention de l’intolérance aux protéines bovines
    • Traitement de l’allergie aux protéines bovines

 

Préparations lactées à base de protéines de lait de vache complètement hydrolysées  (caséine hydrolysée) 

Elles sont utilisées chez le nourrisson qui présente une allergie documentée aux protéines de lait de vache ou de soya ou encore un syndrome de malabsorption. Certaines données rapportent que ces préparations peuvent prévenir la dermatite atopique chez les enfants à risque. Ces formulations sont généralement utilisées sous supervision médicale.

 

Préparations à base d’acides aminés libres à 100%

Elles sont utilisées en présence d’une intolérance aux hydrolysats de caséine ou si le nourrisson présente une allergie très sévère aux protéines de lait de vache ou de soya. Ce sont les préparations lactées qui coûtent le plus cher.

 

Préparations sans lactose

Ces préparations n’ont pas d’indication claire et ne semblent pas procurer d’avantage par rapport aux préparations standards. En effet, elles contiennent tout de même une petite quantité de lactose. Pour cette raison, elles ne sont pas recommandées dans les cas de galactosémie ou de carence congénitale en lactase. On les réserve généralement seulement aux enfants présentant une gastroentérite aigue où une déficience en lactase transitoire est possible, mais leur bénéfice dans ce cas est aussi remis en question. En effet, des données montrent que, même en gastroentérite, l’absorption et la digestion du lactose sont suffisantes pour que les préparations standards soient utilisées. Leur place dans l’alimentation du nourrisson est donc questionnable.

 

Épaissies : Pour plus d’information sur ces formulations, veuillez consulter la fiche sur le RGO chez le nouveau-né.

 

Deuxième âge 

Les préparations de deuxième âge contiennent plus de fer, calcium, protéines, vitamine C et E. Comme le nourrisson est plus âgé, le principe de base des préparations lactées de transition est d’augmenter l’apport en ces diverses vitamines, minéraux et nutriments afin de répondre à ses besoins grandissants. Par contre, comme le nourrisson comble ses besoins en nutriments avec l’alimentation solide, il ne semble pas y avoir de valeur ajoutée liée à l’utilisation des préparations de deuxième âge.

 

Préparations lactées pour prématurés

Elles contiennent une teneur plus élevée en calories et nutriments. Elles sont utilisées spécifiquement chez les enfants prématurés ou encore lors du congé d’hôpital si le nourrisson a un poids insuffisant pour son âge post-conceptionnel.

Préparation des différentes formules

Le guide « Mieux Vivre » réalisé par l’INSPQ est une bonne référence pour guider les parents dans la manipulation des préparations lactées. Quelques tableaux ont été ajoutés à la fiche en tant que référence.

Vous pouvez consulter le guide complet directement en cliquant sur ce lien. Il est aussi possible de cliquer sur chaque tableau présent dans la fiche pour le retrouver spécifiquement dans le guide.

 

 

Caractéristiques des formulations



Préparation des différentes formules


Conservation


Introduction d’aliments solides

À partir d’environ 6 mois, les parents peuvent commencer à introduire de façon progressive des aliments solides. Généralement, l’enfant montre qu’il est prêt par divers moyens : capacité à bien tenir la tête et à la tourner, tonus suffisant pour rester bien assis, intérêt envers les aliments, augmentation de la demande en lait, salivation, etc.

 

Il est conseillé de commencer avec des céréales enrichies de fer et des viandes (ou substituts) afin de prévenir les carences en fer. Les textures plus granuleuses doivent être introduites assez tôt, c’est-à-dire avant l’âge de 9 mois, et il est préférable de privilégier des textures variées avant l’âge de 1 an. Dès 6 à 9 mois, les fruits et légumes, fromages et yogourt peuvent être donnés. À partir d’un an, les parents devraient tenter d’instaurer une routine pour que les repas et les collations soient donnés de façon régulière. Il faut adapter la fréquence et la teneur des repas en fonction des besoins de l’enfant. Il faut donc être attentif et à l’écoute de l’enfant.

 

À noter que lait de vache est contre-indiqué avant l’âge de 9 à 12 mois. Par la suite, il est recommandé de donner du lait de vache pasteurisé 3,25% jusqu’à au moins l’âge de 2 ans. Quant aux boissons de soya, elles ne devraient pas être données avant 2 ans. Il est recommandé d’utiliser plutôt les préparations lactées à base de protéines de soya, car les nutriments et l’apport calorique sont mieux adaptés aux nourrissons et petits enfants.

Auteur

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Marie-Ève Desbiens